« Ce soir, annonce sur la Place de l’Hôtel de Ville pour une intervention du Président Berckley. » C’était Suzan qui avait découvert ce mot dans sa boite aux lettres. Que voulait-il donc dire à ses citoyens notre bon Président ? Cela faisait un bon moment qu’il ne s’était pas manifesté ! Et, sans savoir pourquoi, ça ne mettait pas Suzie en confiance. Car oui, il n’y avait que de mauvaises nouvelles annoncées en ce lieu, jamais de bonnes.

Suzan, aux côtés de sa mère, se dirigeaient en silence vers le lieu du rendez-vous. Frank, son petit frère, était resté à la maison. Il était malade à mourir depuis plusieurs jours. Vidé de toute couleur, un maux de tête insoutenable, et il était presque incapable de marcher. Le pauvre garçon était obligé de tenir le lit à longueur de journée. Sa grande sœur était très inquiète pour lui. Elle n’aimait pas le voir ainsi. L’adolescente espérait fort que les médicaments faits maison de sa mère aller fonctionner. Elle l’espérait de tout son cœur.

Côte à côte, mère et fille se rendirent à l’Hôtel de Ville où une bonne partie des habitants du District était déjà regroupée. Arrivée sur place, le sigle du Capitole s’illumina sur l’écran géant pour laisser place à un journaliste aux cheveux orange vif. Suzan réprima même un rire devant l’excentricité de cet étrange personnage. La caméra zooma sur son visage et il commença d’une voix mi-enjouée, mi-neutre :
- Bonsoir, habitants de Panem. Vous êtes réunis pour apprendre ... une nouvelle. Je laisse la parole à notre cher Président Berckley .

Le visage vieilli par le temps du Président apparut à l’écran. Son visage froid terminé par une longue barbe sur son menton avait toujours mis assez mal à l’aise l’adolescente blonde. Il lui faisait même un peu peur.
- Bonsoir. Nous vous observons toujours avec la plus grande attention. Vos actes, & gestes, les plus insignifiants y compris. Vous vous sentez surveillés. Vous trouvez cela inutile. Et bien, aujourd'hui, je vais vous prouver le contraire. Si nous ne l'avions pas fait, les conséquences auraient été ... dramatiques. Nous avons donc découvert que dans le District Quatre, un début d'épidémie se propageait.

Des murmures effrayés s’élevèrent dans l’assemblée de personnes du 4. Suzan et sa mère en première ligne. Frank. Une épidémie, apparemment mortelle, démarrait dans nul autre que leur District 4. Le cœur de la jeune fille s’emballa. Et si son petit frère chéri était l’un de ses malades de cette terrible épidémie ? Non. Pas lui, par pitié Seigneur, pas lui ! Elle releva ses yeux bleus terrifiés vers l’écran pour voir le vieil homme sourire. Presque de contentement. Quoi ?! Il est heureux que la plupart des habitants de Panem risquent la mort ? Révoltée, Suzan s’empêcha de crier au scandale quand son Président continua, sombre ;
- Cette maladie étant très contagieuse, il se pourrait que tous les Districts soient tôt ou tard atteints. Si quelqu'un de votre famille, ou de vos amis, présente les symptômes suivants, isolez-le le plus rapidement possible.

-Forte fièvre, vomissements, hématomes se trouvant sous la peau, picotements, courbatures de plus en plus fortes, puis paralysie de certains membres. Je précise cependant que vous ne serez pas entièrement paralysés. La fièvre et le reste vous aura tués bien avant. Continua le type aux cheveux oranges en feignant d’être concerné par ce drame.

Le cœur de Suzan s’arrêta de battre. Fièvre, courbatures … Frank ! Oh non ! Pas lui ! Son cher petit frère était atteint de cette maladie mortelle ! Cela faisait déjà quelques jours qu’il était atteint ! Non ! Il ne pouvait pas mourir maintenant ! Il est beaucoup trop jeune ! 7 ans … C’est beaucoup trop jeune pour mourir.
Suzan revint à elle. Autour d’elle, c’était le chaos. Des cris, des pleurs des plus jeunes, et des exclamations de terreur. À coté d’elle, sa mère pleurait doucement au milieu de cette agitation. Trop choquée pour faire quoi que ce soit, Suzie se contenta seulement de regarder avec insistance l’écran en priant pour entendre une bonne nouvelle. Le visage de Berckley reparut devant elle. Il dit :
- Je peux déjà vous dire que nos scientifiques sont déjà en train de chercher le remède. Malheureusement, il ne sera pas prêt avant un bon moment. Je vous demande donc, de suivre ces instructions: Si une personne présente ses symptômes, isolez-le au plus vite, la maladie est très contagieuse et on ne sait pas comment elle se transmet. Soyez donc très prudents. Évitez-donc de sortir de chez vous, sauf pour les choses vitales, comme achetez à manger. Dernière règle, évitez à tout prix de manger du poisson, ou même de vous en approcher.

Elle soupira. Un vaccin était en court de recherches. Mais ce ne serait pas pour demain. Mais il fallait espérer de toutes ses forces pour qu’ils fassent vite. Très vite. Frank ne pouvait pas périr maintenant. Suzan se le promettait. Elle ne le laisserait jamais mourir. Jamais !
Puis vinrent les restrictions. Ne pas sortir ? Ça serait dur de ne pas aller dehors. Elle ne comprenait d’ailleurs pas en quoi cela serait utile de restait cloitrée à l’intérieur de sa maison. Frank malade, elle risquait plus d’attraper cette saloperie qu’autre chose. Alors que dehors, les chances étaient déjà beaucoup plus restreintes. Mais bon. Et le poisson ça ne serait pas évident non plus. Ici, on bouffe que ça ! Bref, le journaliste rajouta une dernière petite parole et le générique de la fin de l’émission retentit dans la place. Le sceau du Capitole apparut une dernière fois puis l’écran devint noir. Un silence de mort planait sur les habitants du District 4. Chacun était plongé dans ses pensées. Personne ne bougeait d’un cil puis les premières familles retournèrent chez elle lentement, et en silence.

Suzan était assise sur une des chaises de la cuisine. Frank était dans sa chambre, toujours endormi. Leur mère, elle, pleurait sans relâche, la tête enfouie dans les mains, assise dans la chaise en face de celle de sa fille. Cette dernière regardait la porte close menant à la chambre de son petit frère malade, le regard vide, et embué de larmes. Prise d’un élan de colère, elle se leva brusquement et lâcha à sa mère que ne réagit même pas tant elle pleurait :
-Je reviens dans une heure … !

Le pas rapide et violent elle courut jusqu’à la Forêt Bleue, son antre de calme. Une fois sur place, elle s’assit sur un tronc au sol et pleura toutes les larmes de son corps qu’elle retenait depuis la sinistre nouvelle. Le soleil plongea dans l’eau du Lac et dans ses poissons empoisonnés et porteurs de la maladie maudite.